En Louisiane, où Dylan et Kija sont arrivés, un jour, un ouragan éclate, et les deux amis connaissent une fois de plus la violence de ceux qui refusent les droits légitimes des Noirs. A la Nouvelle-Orléans, les démocrates veulent s'opposer au droit de vote des Noirs discuté à l'Assemblée.
La Floride et ses rêves de trésor peuvent attendre... Après cette effervescence de quatre jours, parenthèse historique et mouvementée, les deux compagnons se retrouvent, comme prévu, sur le bateau en partance pour la Floride. (Raymond Perrin, Dylan Stark 2, Lefrancq, 1998).
La petite histoire... Cet épisode, écrit en juin 1968, est publié quelques mois plus tard : le drapeau rouge de la jaquette, et surtout le texte de la 4ème page de couverture, sont sans aucun doute des réminiscences d'une actualité plus immédiate que la Guerre de Sécession... Il est entrecoupé de six textes historiques authentiques (discours, dépositions, ...) tirés d'un ouvrage de Godfrey Hodgson : Carpetbaggers et Ku-Klux-Klan (paru chez Julliard).
La ville pour Hilkija Britton, ce n'était rien qui vaille.
Rien du tout. En forêt, en plaine ou en savane, tout se serait passé autrement. Kija aurait tenté l'impossible pour semer ses poursuivants. D'abord cela. Et puis, s'il n'y était pas parvenu, il aurait agi en homme qui vend cher sa liberté d'homme, ainsi qu'on doit le faire : il aurait tiré.
Et pour sûr que deux ou trois de ces imbéciles de flics lancés à ses trousses auraient déjà embrassé le pavé.
En forêt ou en savane, oui…Là rien n'est compliqué, tout est net et sans détours. Mais pas dans les villes, ces enfers sur terre que les hommes se fabriquent par peur du vent qui souffle, par peur de la faim, par peur de la douleur, par peur de la peur… Monuments-aux-vivants que, par peur, on vénère…
Il courut une centaine de yards encore au milieu de la rue déserte jonchée de pavés déchaussés de pavés déchaussés et de détritus. Une rue inconnue, tremblante et grise comme un cauchemar, enfermée dans les hauts bras sombres des maisons mortes ; une rue sans nom, trouvée là, au bout de ses pas, par hasard, dans la fuite.
Comme un cauchemar, oui…, un sale rêve qui vous tiraille le sommeil et vous transforme le repos en supplice, un monde affreux d'où l'on sait pourtant qu'on pourra s'évader, rien qu'en ouvrant les yeux. Seulement, Kija avait les yeux bien ouverts, et il courait réellement. Les crampes de fatigue qui se nouaient dans ses jambes, cette boule brûlante qui allait et venait des poumons à la gorge au rythme fou de sa respiration précipitée, rien de tout cela n'était illusoire.
Sa course vint mourir contre un arbre, au bord de la chaussée. Fermant les yeux, il les rouvrit une seconde pour que s'envolent ces fulgurations brillantes et rouges qui lui dansaient sous les paupières. Il jeta un rapide coup d'œil sur les alentours, grimaça de dégoût et de douleur à la fois. La nuit venue renforçait encore la couleur d'infini qui baignait cette rue. Les maisons rangées comme des soldats pétrifiés… Par une seule fenêtre ouverte, ni une porte… Des cages-à-hommes, bien closes…
Tout près, sur le trottoir, les poubelles étaient renversées, toutes tripes vomies ; l'une d'elles, enflammée quelques heures auparavant, se tordait, noire et figée. Une sorte d'ours, de peluche roussie, manchot par surcroît, était mort, une patte raidie, parmi les détritus.
Kija essuya la sueur qui ruisselait de son front, rebroussa de la main sa crinière rousse emmêlée.
- Bon Dieu ! souffla-t-il.
Le couard, c'est celui qui, dans une situation périlleuse, pense avec ses jambes (Ambrose Bierce).
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Page créée le samedi 20 avril 2002. |