Depuis le site d'Unspeakable Town, caché sous le nom de Kentrie pour retrouver les guérilleros d'El Paso, meurtriers de ses parents, Dylan se fait conduire dans la montagne et atterrit en plein "nid de guêpes", chez ce vieux fou de Matithias Teafield qui fait croire à son fils que la guerre continue. La décision de piller Pineville et le désir de sortir du piège poussent Dylan à faire éclater la vérité et le scandale.
La horde aux abois se déchaîne et c'est la fuite éperdue en compagnie du commerçant Nebucad et de Caerog, le "mort vivant" tué par le mensonge et la mythomanie guerrière, vers la ville de Siloam Spring, toujours en Arkansas. (Raymond Perrin, Dylan Stark 2, Lefrancq, 1998).
Pour Asaph Bewo, le petit homme, tout se déclencha le jour où, pour la première fois depuis le début de la guerre, on remit le feu aux herbes rôties par août et son soleil torride. Il se passa beaucoup de choses bizarres ce jour-là ; diverses circonstances, totalement indépendantes les unes des autres, se mêlèrent étrangement, à un instant précis, comme irrémédiablement attirées entres elles, pour se confondre finalement avec le visage du Hasard. Ce fut un jour marquer d'une croix. Un de ces moments auquel s'accroche facilement le souvenir.
D'abord les gens mirent le feu aux herbes et, rien que ça, c'était d'une très grande importance. Cela ne s'était pas vu depuis presque cinq années. Durant tout le temps noir de la guerre, on n'y avait pas songé. On n'avait plus les idées bien en place et il était plus pressant de résister aux raids des Jayhawkers ou des Red Legs, ces irréguliers du Nord antiesclavagistes à outrance, plutôt que songer à brûler les herbes quand en vient le moment.
La guerre s'était présentée sous un faux visage dans ce coin perdu qu'était la "ville" d'Unspeakable-Town et ses environs, à l'extrême nord-ouest de l'Arkansas, trop proche de l'Indian Territory encore sauvage et sans loi, et du Missouri yankee. Là, au plus profond des montagnes arides de l'Ozark, en retrait presque total des centres civilisés, là, à plusieurs miles de la piste la plus proche reliant Siloam Spring à Pineville, on n'avait pas entendu le canon, on n'avait pas vu défiler les soldats, les blessés. Il n'y avait pas eu le fracas fou des batailles pour résonner entre gorges blanches taillées dans la pierre à chaux, bousculer le soleil et déranger les opossums dans les arbres. Rien de tout cela. La ville - qui comptait au plus une dizaine de baraques -, n'avait pas envoyé ses hommes à la guerre. Elle avait refusé.
Mais que ceux qui s'apprêtent déjà à blâmer sans savoir, ravalent bien vite les mots "devoir" et "patrie" tout prêts au fond de leur bouche, mélangés aux insultes. Qu'ils essaient de comprendre. C'est très simple en vérité… c'est excessivement simple et, pourtant, peut-être ne comprendront-ils pas, ils ne connaissent pas les gens de cette région de l'Ozark. Il faut qu'ils sachent tout d'abord, que les hommes nichés sur ce coin de terre sauvage, inhospitalière au possible, n'étaient pas ceux que l'on achète avec des paroles et des exaltations patriotiques. Ils étaient du Sud parce que l'Ozark poussait ses montagnes jusqu'en Arkansas. Rien de plus. Leur pays à eux n'était pas la Virginie ou la Caroline. Point de champs de coton ou de tabac dans ces vallées tortueuses et étroites, au pied des collines pâles, dans le labyrinthe désolant des caillasses polies de soleil : point de maisons à colonnades et fronton grec, de style victorien, avec la cloche de bronze devant le portail pour appeler les travailleurs noirs dans les plantations ; point de parcs ombragés autour des palais, de promenades en calèches avec les rires des femmes suspendus aux grelots des attelages ; point de crinolines froufroutantes glissant comme des magies, et la cheville mignonne, de blanc gainée, aperçue un instant. Diantre, non ! C'était tout autre.
Le couard, c'est celui qui, dans une situation périlleuse, pense avec ses jambes (Ambrose Bierce).
Il faut vivre dangereusement (André Malraux).
Fiche Marabout
Sans date
Dans un coin montagneux de l'Arkansas, l'Ozark a pratiquement échappé aux horreurs de la guerre de Sécession, mais à de nombreuses reprises des bandes d'irréguliers nordistes l'ont dévasté au cours de raids sauvages. Quand Dylan Stark arrive dans la région, poursuivi par ses ennemis de Jaspero, il sent confusément qu'une curieuse atmosphère pèse sur ce pays où toute l'activité est conditionnée par "la Montagne". Les gens du lieu désignent ainsi la sombre colline où le vieux Teafield a installé son nid d'aigle et où il se terre, sans jamais en sortir, avec son fils et une troupe d'irréguliers, guérilleros au chômage. Le plus étrange est que l'on ne sait pas, ou que l'on ne veut pas dire, ce que font là ces hommes en armes, comme des soldats au cantonnement.
Pour échapper à ses poursuivants, Dylan Stark décide de se mettre pour un temps au service du "seigneur au col crasseux", le mystérieux Teafield. Dés ce moment, il va de surprise en surprise. Il est logé et nourri, bien sûr, mais ses rapports avec la bande du patron se dégradent vite, surtout lorsqu'il découvre le fin mot de l'histoire.
Une fois encore, Pierre Pelot se montre un maître dans
l'art de brosser un décor, d'évoquer les sentiments complexes qui peuvent
agiter les hommes de l'Ouest, ces êtres déchirés par une guerre cruelle plus
que d'autres et dévoyés par les conditions de vie dans un pays immense, en
partie encore vierge et sauvage.
Les romans où apparaît Dylan Stark sont une oeuvre forte et enthousiasmante,
une manière de biographie de la jeune Amérique à travers celle d'un homme
digne de ce nom.
Livres Jeunes aujourd'hui
N° 17, février 1981. Monique MATHIEU (Comité de lecture de Paris)
Cet épisode de la série Dylan Stark raconte la vengeance longtemps attendue du vieil Asaph Bewo, exaspéré au fil des années par la bonté de son maître Mathias Teafield, auquel il a voué sa vie. Curieux maître, ce "vieux loup" entouré de guérilleros patibulaires, qui fait croire à son fils que la guerre de Sécession n'est pas finie. Pour atteindre ses fins, Asaph Bewo utilisera Kembrie (alias Dylan Stark) qu'il rencontre affamé, démuni de tout, poursuivi par des hors-la-loi sudistes. Il le fera embaucher par son maître, puis exigera sous la menace qu'il révèle la vérité au fils trompé, détruisant ainsi l'autorité inentamée du maître. Cette tâche accomplie, Dylan Stark repart pour de nouvelles aventures.
Nous sommes en plein univers de western et les amateurs retrouveront ce qui en fait le charme : violence, héroïsme, personnages dotés d'une forte personnalité, atmosphère américaine. L'on peut se prendre à cette histoire, assez compliquée parfois car toutes sortes d'intrigues s'entrecroisent. L'analyse des personnages est bien conduite et peut habituer de jeunes lecteurs à s'intéresser à la psychologie.
Écriture assez recherchée, avec quelques passages très évocateurs (p. 49-51). Un regret : l'absence de carte, vu les noms propres du début. Noter cependant une brève rétrospective historique de la fin de la guerre de Sécession qui éclaire cet épisode.
Convient dès 13-15 ans aux amateurs de westerns et encore peu attirés par des livres plus classiques. Peut permettre le passage de la bande dessinée à la lecture d'un livre.
Page créée le mardi 8 janvier 2002. |