La Liberté de l'Est, 18 janvier 1994. Raymond PERRIN
La Liberté de l'Est, 8 février 1994.
L'Est républicain, 23 février 1994. Michel CAFFIER
L'Événement du jeudi, 31 mars 1994. Y. P.
La Liberté de l'Est, 22 novembre 1994. Gérard NOËL
L'Année de la fiction 1994. Laurent GREUSARD
Le Magazine littéraire, mars 2000.
Livres en liberté. 18 janvier 1994. Raymond PERRIN
Couleur du temps
et couleur des hommes
Sur les épaules de ce perchoir à histoires qui fait son miel de tout ce qui mérite de tomber au creux de sa vallée, il arrive que la récolte soit si abondante que les éditeurs rechignent. C'est le cas lorsque les ballons accouchent d'un récit de 600 pages ! Voilà pourquoi on attend depuis si longtemps cette savoureuse "histoire d'autochtones et de touristes", déjà écrite en 1988. Après diverses cures d'amaigrissement, dans les tiroirs d'une bonne dizaine d'éditeurs, paraît enfin ce roman de presque 400 pages - un des récits les plus achevés tant du point de vue de la construction que de l'écriture - et qui reste imposant sur plusieurs plans.
Dans la plus longue branche du village en étoile de Vizentine, pseudonyme moyenâgeux et néanmoins transparent pour les familiers de la Haute Moselle, cohabite un trio dont les farces estivales renforce l'estime mutuelle et l'entente. Pourtant, ils illustrent presque trois générations successives. D'abord, il y a l'aîné, Elian Toussaint, un quinquagénaire dont la faconde truculente n'a d'égale que la générosité naturelle pour peu que l'on ne touche ni à "son" ruisseau, ni à son gourbi-capharnaüm, fabriqué au-dessus du garage. Au cœur de la maison proche vit son neveu Anjo, trente ans, un homme plutôt calme sauf lorsqu'il part en escapade amoureuse en Allemagne.
Enfin il y a Paul Lobe, un gamin de dix ans, plus connu sous le nom de "Cinq-Six Mouches" parce que, comme le dit son (faux) oncle Elian : "Celui-ci, il est pire que cinq-six mouches dans un bocal". Il habite d'habitude "au village", dans la maison reconstruite près d'un des garages des frères Voke, le seul reconstruit après l'incendie, mais il est inutile d'en dire plus puisque la lecture de L'Été en pente douce vous a tout dit sur ce drame.
Dans les Hautes-Vosges en 1986
Ce n'est pas un hasard si Pelot a choisi la "vallée" des Charbonniers ou de l'Agne, "étroite, secondaire et écartée, isolée, mal desservie par une route en lacets méchamment serrés". C'est d'abord celle qu'il préfère : ne lui a-t-elle pas fourni deux (autres) pseudonymes ? Celui de Carbonari pour quelques nouvelles, et surtout celui de Suragne pour le Fleuve Noir. Il fallait d'autres raisons plus impérieuses : par exemple, l'existence, en ces lieux, d'une course clownesque et folklorique le jour du 15 août où l'on voit célébrer la "République libre des Charbonniers". Or, l'intérêt historique, voire coutumier, n'est qu'un épiphénomène et la relation de cette manifestation, sommet à la fois burlesque et pathétique, n'a rien à voir avec n'importe quel compte-rendu journalistique.
En fait, cette fausse course sert de détonateur à une crise menée alors à son paroxysme. Il faut d'ailleurs répéter, pour éviter toute approche régionaliste et réductrice, que le cadre vosgien renforce seulement l'effet de réel d'un récit qui met en scène des personnages aussi crédibles en Arkansas, dans le Caucase ou en Patagonie, tant leurs sentiments, leur comportement, sont d'une humanité universelle.
En plus d'une assise géographique aussi solide que "les voussures de la montagne" "enserrant le val", il fallait une insertion dans un cadre historique précis. Ceux qui s'étonneront d'entendre encore "la micheline ferraillante qui se traîne et s'arrête à tous les patelins" comprendront vite, au besoin avec un pincement nostalgique, que nous sommes en 1986. Il est que, de l'univers hétéroclite de cette enclave d'un autre âge, peuvent aussi bien surgir les motos rutilantes, les staccatos des flippers et les fumées des Stuyvesant que la poire en bakélite d'un commutateur, un archaïque robot musical, les paniers ou "tacounets" pour sécher les oignons, ou les stères de rondins. La langue aussi emprunte, à tous les niveaux de langue, des vocables et des tons qui composent un cocktail savoureux et détonant. Mots empruntés au terroir ou la rhétorique, à l'argot ou au langage professionnel, brassés harmonieusement dans un récit à la texture solidement tramée.
Un été torride pour une histoire d'amour
Dans ce microcosme où vit ce trio hors du commun, pour l'instant, les statuettes de bazar trônant sur un téléviseur disent que le temps est beau puisqu'elles sont "bleues". Rien ne trouble le plaisir des amis dont on ne sait lequel serait le plus "gamin", jusqu'à ce que surviennent les estivants du mois d'août, les Violet, qui s'installent avec leur fille au rez-de-chaussée de la maison d'Irène, belle-sœur d'Elian et mère d'Anjo.
Il y a longtemps que l'on sait que Pelot est un des rares romanciers capable d'écrire une histoire d'amour sans jamais être ridicule. C'est encore le cas cette fois. Pourtant, il prend le risque d'exposer presque trois générations à la fascination qu'exerce une seule créature de rêve. C'est une "apparition" aux cheveux noirs de jais, symbole du mystérieux pour un enfant déjà enfiévré par des piqûres de guêpes.
Anjo, lui, découvre la jeune fille, depuis sa voiture, la nuit, dans la cour de sa maison. Il reste les jours suivants, des heures durant, prostré sur un banc. Il faudra plus de temps pour troubler le plus vieux, pour que le curieux malaise s'insinue sous sa peau au point qu'il délaisse son entraînement de bouffon vélocipédiste pour la course du 15 août.
La folie frappe chacun à sa manière. L'un refuse de fabriquer de superbes faux oeufs de ferme pour touristes et délaisse paille et teintures qui faisaient merveille. Il fugue même vers les étangs de la Haute-Saône en pleine nuit ! L'autre tourne en rond avec "sa tête de retour d'Allemagne" jusqu'à ce qu'il devienne enragé "comme un malheureux chien 0 qui une renarde vient de tourner les sangs". Et "Nom d'une bête en bois", le plus aguerri lui-même, atteint par le "malaise", se remet à boire au point de grimper au plus haut du clocher, pour haranguer la foule dans une robe de mariée !
Malgré elle, par sa seule présence, fugitive et fugace, la jeune fille met à jour tous les secrets réels ou fabriqués que cache cette famille, tous les non-dits accumulés. Elle ameute les démons du souvenir et des rancœurs mal éteintes. A la violence des mots, chargés de truculence et d'humour décapant, mais qui peuvent aller au-delà de la vérité et tuer toute humanité, risque de succéder la violence des gestes. Comme Le Pain perdu ou L'Été en pente douce, voici un roman de l'été torride, mais la saison des passions paroxystiques économise cette fois les fermes et les garages, et n'embrase que les cœurs et le ciel.
Si un personnage domine dans le roman, c'est celui d'Elian : survivant d'une espèce vivotant dans un monde révolu et sans succession, il résiste encore - mais pour combien de temps ? - au clonage, à la robotisation épidémique et planétaire. Après l'enfer d'un passé ruminé en silence, Elian est aussi un survivant à titre individuel puisqu'il a probablement survécu à pas mal de naufrages comme celui dû jadis à l'alcool, ou ceux conjugués d'un amour impossible, d'une solitude viscérale, d'une culpabilité sournoise, d'une mort affective lointaine et sans rémission. Que cache la logorrhée verbale de ce vieux fou qui laisse son interlocuteur incapable de dire "en fin de compte s'il avait prononcé deux paroles sensées à la suite l'une de l'autre" ou le "charabia" qui subit patiemment Martinette dont il demeure "le petit ami secret" ? L'humour décapant et multiforme est aussi un rempart qui retient ou voile pudiquement les épanchements lyriques d'une tendresse bourrue.
Derrière le brouillage des mots et la ronde des jurons, tout comme derrière le bric-à-brac hétéroclite qui encombre "son repaire", "sa tanière", subsistent trop de souvenirs, d'attentes déçues, d'amours tues, d'élans réprimés, pour qu'il ne soit pas celui qui va souffrir le plus. Non pas tant d'une passion amoureuse dont il connaît bien "les délicieux poisons" et la chute douloureuse que de la blessure de l'amitié trahie, autant par un petit "faussaire repenti" que par un taciturne soudain enragé.
Le roman d'un flâneur
On ne circule pas dans un roman de Pierre Pelot en supersonique ou même en T.G.V. Comme un laboureur qui, tout en traçant minutieusement chaque sillon de son champ, perçoit en même temps les "tchipetis" des oiseaux, le vol effarant et magique d'un héron, l'éclat "des aiguilles de bronze des épicéas", le romancier cisèle sa phrase tel un marcheur comptant ses pas, dans le plaisir bruissant des mots. Zappeurs et cueilleurs "massacreurs de brimbelles à la rifflette" s'abstenir ! Si vous n'êtes guère sensible aux "odeurs de résine, d'humus et de taillis", à la caresse d'un chat (sans nom) rayé de jaune, aux rengaines des grillons, au bleu léger des montagnes, en somme "aux bruits de la vie", alors ce livre n'est peut-être pas pour vous. En revanche, si vous savez flâner, vous laisser gagner par une atmosphère lentement tissée, au fil des mots dispensant leurs indices, alors vous ne résisterez pas au charme envoûtant d'un récit patiemment et amoureusement écrit.
Roman d'amour et d'humour, d'amitié surtout, plus sur les crêtes du rire que des larmes cachées, l'histoire flirte avec le tragique sans l'atteindre vraiment et plonge dans le burlesque savoureux et cocasse, sans jamais user des excès de la caricature.
C'est aussi un récit d'une sagesse durement acquise par ce qu'on nomme l'âge adulte. Or c'est l'enfant qui est le premier à saisir ces "petits bonheurs d'une mystérieuse banalité", loin de ce qui fait trop mal. Parfois, les hommes savent que les "cicatrices" se ferment pour eux comme pour les reliefs et, qu'après les orages, la vie continue car "au moins, ce soir encore, après tout, les souris sont bleues".
8 février 1994.
Roman d'amour et d'humour, d'amitié surtout, plus sur les crêtes du rire que des larmes cachées, l'histoire du Vosgien éclectique flirte avec le tragique sans l'atteindre vraiment et plonge dans le burlesque savoureux et cocasse sans jamais user des excès de la caricature. Si vous savez flâner, vous ne résisterez pas à son charme envoûtant.
23 février 1994. Michel CAFFIER
Pelot, le William Kennedy des Ajols
On attendait un jour ou l'autre, après tant de livres, un grand coup de Pierre Pelot de Saint-Maurice-sur-Moselle. C'est fait. Et comment!
Les éditeurs ont renoncé à publier la bibliographie de Pierre Pelot dans les premières pages de ses romans. Il faudrait un folio de plus et le prix augmenterait de 10 ou 12 F par exemplaire. La liste des quelque 150 titres est en effet fort longue. Mais s'il n'en reste qu'un, ce sera celui-ci : Ce soir, les souris sont bleues, un étonnant récit qu'on peut qualifier d'adulte en référence à la complète maturité de cet écrivain prolifique, artisan puissant, passé des tailles abruptes et rapides de la serpette à la taille soignée d'un ouvrage d'ébénisterie sorti du même hallier.
Explication du titre : il s'agit de deux souris taillées dans une pierre "qui change de couleur selon le degré d'humidité de l'atmosphère", ce que fait l'obsidienne sur un masque toltèque selon la luminosité de l'instant. Quand les souris sont bleues, la vie est plutôt rose. Elles ne le restent pas dans chaque chapitre du livre de Pierre Pelot car cet été-là au village (dans le 88!), la canicule perturbe les esprits les moins solides qu'agace, par ailleurs, une autre souris, joli bibelot également, mais pas du froid granit dont on fait les symboles caméléonesques.
Imprégné de sa montagne
Pourquoi le "William Kennedy des Ajols" ? Pierre Pelot n'a peut-être jamais lu le romancier d'Albany (L'Herbe de fer) mais, comme la prose de Monsieur Jourdain, on peut faire du kennedysme - et du meilleur - sans le savoir. D'abord parce que, imprégné de sa terre, de sa montagne, des sentiers, des rivières et des lacs, Pierre Pelot place son aventure dans un seul lieu, clos et tellement grouillant, fréquenté par les estivants des locations de vacances, traversé par les Hollandais en mal d'altitude moyenne. Ensuite, par la présence constante, rebondissante, de personnages pittoresques aux réactions inattendues, rustres et si naturelles qui, par leurs gesticulations, décisions à l'emporte-pièce, volte-face épidermiques, leur humour, leur attachement immédiat à la nature, animent l'aventure, par les mille détails savoureux du déroulement quotidien, davantage encore que la, non négligeable, trame romanesque.
Pierre Pelot, qui colle tellement au terrain, si proche d'un frétillement de truite, d'un aboiement de chien, d'une trouée de forêt qui montre la vallée, possède ce talent rare de nous transporter dans un ailleurs voisin, une bulle d'imagination, ce vrai miracle des bonnes lectures et, donc, des bons ouvrages.
Mon village à l'heure Violet
Ces souris bleues - et l'autre non plus - ne se racontent pas. Elles sont toutes, de pierre ou de chair, une quatrième et une cinquième en plus, dans le collimateur de trois zozos zinzins qui, par leurs comportements, leurs gestes, leurs propos, leurs tics, justifient amplement la flatteuse comparaison avec Kennedy. Ils vivent chez Tatirène, 49 ans, ouvrière d'usine. Elian, 50 ans, invalide du travail et son fils, Anjo (Jean-Joël), 30 ans, son fils Paul dit Cinq-Six Mouches parce qu'il semble en avoir toujours quelques-unes dans le bocal.
En plus de la chaleur et de la préparation de la course cycliste, en cinq étapes de bistrot, de la fête des Charbonniers (15 août), l'arrivée des Parisiens d'août, les Violet, avec Mylène, jette le trouble dans le fantasque et fantastique brio. Avant le 15 août, c'est le 14 juillet sur les chaumes avec un feu d'artifice qui part dans tous les sens. Heureusement, le toubib est là pour soigner les brûlures et le reste : il s'appelle Dani le Rouge, mais par ce temps-là, c'est pas rouge ni violet qu'il est (tiens, tiens...).
Pelot le solitaire de Saint-Maurice n'a pas sorti les griffes - il est trop généreux pour cela - mais montre, définitivement, que le grand ours du massif a in sacré coup de patte.
Sortez de votre trou : lisez d'urgence Les Souris bleues. Grignotez le bonheur de lire.
31 mars au 6 avril 1994. Y. P.
Forçat de l'écriture capable de trousser plusieurs romans par an et colosse vosgien avide d'amitié et de bonne bouffe, Pierre Pelot nous revient avec ce gros livre où il retrouve la veine de cet Eté en pente douce dont Gérard Krawczyk tira le film que l'on sait. Là aussi, tout se passe l'été, dans un village vosgien que l'on devine écrasé par la chaleur. Dans leur maison, qu'ils ont louée en partie à des touristes, Elian, 50 ans, Anjo, 30 ans, et Cinq-Six-Mouche, 10 ans, voient leur quotidien bouleversé par l'arrivée d'une jeune femme... L'un vire barge, l'autre perd la course cycliste qu'il gagne depuis dix ans, et le dernier disparaît à la recherche de hérons. Rien ne va plus. Trop d'alcool, trop de cris, trop de soleil... Ils ne se sortiront de ce pandémonium que grâce à la tendresse qui les unit. Pelot réussit là un roman fort, d'où sourd à chaque phrase sa passion pour l'Autre.
22 novembre 1994. Gérard NOEL
Prix Erckmann-Chatrian
et Pierre Pelot :
le rendez-vous manqué
Battu d'une voix par Henriette Bernier, le Vosgien Pierre Pelot a recueilli hier à Metz cinq suffrages pour son roman Ce soir, les souris sont bleues. Les jurés du Goncourt lorrain ont laissé échapper une belle occasion de couronner un des écrivains les plus originaux de l'époque.
Dire que la moitié du jury Erckmann-Chatrian ou presque (cinq membres sur onze) affichait hier sur les coups de treize heures une mine défaite n'est nullement exagéré. Henriette Bernier venait d'être couronnée. Les défenseurs de Pierre Pelot ont difficilement accepté que le Vosgien ne soit pas le lauréat du 65° prix. Une occasion manquée (ou simplement différée) de couronner cet auteur original.
Bichelberger.- Le président, se félicita que le jury soit constitué de onze membres et non de dix pour ne pas avoir à faire jouer la voix double attachée à sa fonction. "Si cela avait été le cas, je pense que je n'aurais pas pris la décision et que le prix aurait été attribué conjointement à Mme Bernier et M. Pelot". C'est dire si le choix fut serré cette année. Presque douloureux.
Un second tour.- Il fallut un second tour puisque le premier avait attribué cinq voix à Mme Bernier, quatre à Pierre Pelot, deux jurés choisissant l'un la Messine Sophie Chérer pour Le Dimanche des réparations, l'autre le Thionvillois Sylvain Chimello pour Les Nuits de fer.
Une femme empêchée.- Tel est le titre de l'ouvrage couronné paru chez Belfond. Plus qu'une simple histoire paysanne, c'est le destin tragique d'une femme qui est évoqué avec beaucoup de pudeur et d'intensité dramatique. Commentaire du président Bichelberger : "Le style est classique, pudique, elliptique, fait de petites touches. C'est un livre impressionniste".
Les souris bleues.- Laissons Raymond Perrin, spécialiste passionné, parler du livre de l'écrivain des Hauts, ainsi qu'il le faisait dans La Liberté des livres du 18 janvier dernier : "Roman d'amour et d'humour, d'amitié surtout, plus sur les crêtes du rire que des larmes cachées, l'histoire flirte avec le tragique sans l'atteindre vraiment et plonge dans le burlesque savoureux et cocasse, sans jamais user des excès de la caricature". Un jugement que corrobore celui de Roger Bichelberger qui parle de "truculence et d'invention", et souligne le côté "profondément populaire" de l'oeuvre : "C'est rabelaisien, c'est vert, c'est du Pelot".
Amaigrissement.- Pelot avait accouché en 1988 d'un roman de 600 pages qui, après diverses cures d'amaigrissement et le passage dans les tiroirs d'une bonne dizaine d'éditeurs, devint Ce soir, les souris sont bleues que Denoël accepta de publier [...].
L'Année de la fiction 1994
Amiens : Encrage, 1995, pp. 246. Laurent GREUSARD
Dans une maison d'un village vosgien qui sert de gîte rural vivent Elian, sa belle-soeur, veuve, et son neveu, Anjo. Pour l'été, ils accueillent le petit Cinq-six-mouches, membre de la famille, et des locataires, les Violet. Ils ont amené leur fille, Mylène, la vingtaine qui tape dans l'œil du petit et d'Anjo, qui boude sa "fiancée" du moment.
Elian tente de faire partir les Violet car il craint pour son neveu qui lui jette des rancœurs familiales à la tête. Cinq-six-mouches tente une fugue mais revient le soir même.
On prépare la course cycliste que gagne, depuis dix ans, Elian. Entre deux discussions amoureuses avec Martinette, la patronne du café, Elian sent que les temps ont changé et que la chaleur de l'été exacerbe les tensions villageoises (chaleur symbolisée par une souris rose qui devient bleue lorsque le temps se met au beau).
Finalement, épuisé, Elian perd la course et par boire, rejoint par Mylène qui ne tient pas à Anjo. Elle est là, surveillée par ses parents qui craignent qu'elle retombe dans l'enfer de la drogue. Ivres, l'homme et la jeune fille se jettent du haut de l'église. Ils sont juste blessés. Tandis que Mylène est mise dans un établissement spécialisé, Elian, Anjo et Cinq-six-mouches reforment un groupe uni.
Ce roman de Pierre Pelot se situe dans la lignée de L'Été en pente douce (qui se passe au même endroit, il y est fait référence dans le roman), qui évoque la campagne vosgienne. Les personnages bien typés essaient de survivre malgré le poids du remords (Anjo à trente ans court les filles, Elian se reproche la mort de son autre neveu) et de retrouver dans une amitié virile et simple, entre générations, le goût de vivre. Une réussite de Pelot, même si elle s'éloigne des genres policiers.
Mars 2000, N° 385, p. 96
Pelot est un auteur prolifique qui se déchaîne dans toutes les directions. Quand... les souris sont bleues, en bon vosgien il vous parle de ruisseaux, de truites, du vélo chez les vétérans et d'amour fou s'emparant de trois hommes à trois âges de la vie, 50, 30 et 10 ans. Bien sûr pas de la même façon, mais Elian, Anjo et Cinq-six-mouches tombent raides devant Mylène, laquelle ne songe qu'à jaillir du cocon familial à coups d'alcool et de drogue. Péripéties, heurts, petits malheurs et grands sentiments dans le terroir. En revanche, quand les Xuah, il y a quelques millions d'années, perdent [...]
Page créée le dimanche 28 juin 1998. |