Roman toc

 
 
  • Pierre Pelot
  • 1985 | 107ème roman publié
  • Noir
 

Date et lieu

En 1984, dans un snack-station service-motel, sur le bord d'une route entre Reims et Metz (?).

Sujet

Des jours barbouillés, qui n'en finissent pas d'hésiter entre le beau et le triste... Les nuits pareilles... comme un vieux décor de film muet, même pas technicolor : noir et blanc - en fait, oui, plutôt black, copie rayée... Et les essuie-glaces pataugent tout ce qu'ils savent sous les flots des averses, en couinant... La douche terminée, le soleil tombe des nuages crevés : ça devient très lumineux. Il prenait ses lunettes noires sur le plat du tableau de bord, les plantait sur son nez.

Le paysage se teintait en jaunâtre. Mal dormi. Et des cauchemars qui s'incrustent, qui vous dessinent de belles poches sous les yeux, qui vous râpent la mémoire quoi que vous essayiez de faire pour les chasser. Ç'aurait pu être dans un film américain, au bord d'une de ces routes qui traversent les banlieues interminables. Mais non : c'était en France, dans la vie, à cheval entre deux saisons, à la dérive entre quatre couleurs. Un vendredi. (4ème de couverture, 1985).

 

Éditions

Photo couverture de Frédéric Mouly.

  • 1ère édition, 1985
  • Paris : Fleuve Noir, juin 1985 [impr. : 04/1985].
  • 18 cm, 180 p.
  • Illustration : Frédéric Mouly (couverture), (intérieures).
  • (Spécial police ; 1952).
  • ISBN : 2-265-03015-5.
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    Première page

    Sur la route luisante, plus brillante qu'un fleuve plat, il avait, ce matin, passé la frontière entre juillet et septembre, sans rien remarquer de spécial.

    C'étaient des jours barbouillés qui n'en finissaient pas d'hésiter entre le beau et le triste, des nuits pareilles. Comme un vieux décor de film muet, même pas technicolor, noir et blanc - en fait, plutôt black. Copie rayée...

    A certains moments, trop bas, trop lourd, le ciel crachait une averse brutale qui fouettait violemment l'asphalte. Les essuie-glaces luttaient tout ce qu'ils savaient contre les trombes, en couinant. Enervant. Après quoi, la douche terminée, des zébrures et des déchirures bleues, dans les nuages lancés au galop, laissaient filtrer le soleil. Ca devenait très lumineux, étincelant. Il arrêtait les essuie-glaces et prenait ses lunettes noires, sur le plat du tableau de bord ; il les plantait sur son nez, d'un geste automatique. Le paysage devenait jaunâtre.

    Depuis longtemps, les premiers arbres avaient viré au roux, avec des mèches jaunes franc, comme ces coiffures punks aujourd'hui à la mode : depuis le milieu de l'été, à cause de l'excédent de chaleur. Et la teinture tenait bon. Difficile de croire, à présent, que l'été avait pu être aussi sec, brûlant.

    Non, il n'avait rien vu de particulier, ce matin, dans la brume, qui puisse être un signe indubitable du changement de saison, du passage d'un mois à l'autre. Depuis une bonne semaine, davantage, c'était pareil.

    (Mal dormi, dans un hôtel bruyant de la banlieue de Reims, bondé de routiers qui avaient fait la nouba dans la salle de restaurant bien après minuit. Un de ces hôtels dont les parois laissent passer le moindre éternuement du voisin, un de ces hôtels dont les revêtements muraux semblent être tissés de bruits, comme si l'armature des murs était faite uniquement de canalisations glougloutantes. Très mal dormi. Avec, en plus, des cauchemars qui s'incrustent et vous râpent la mémoire du lendemain, quoi que vous essayiez de faire pour les chasser... contrairement aux jolis rêves agréables qui, eux, par contre, s'évaporent en trois dixièmes de secondes au réveil, alors qu'on y laisserait une fortune pour pouvoir s'en souvenir à perpétuité. Eh oui. Des cauchemars idiots, en plus. Sans rime ni raison. Juste bons à vous gâter l'existence.)

    Il avait mangé dans un autre routier - Aux Routiers, tout bêtement...-, seul à une table au fond d'une salle quasiment vide qui puait la bière tiède et les fritures non identifiables. Le plat du jour : civet de lapin et pâtes. Des coquillettes. Le lapin trop cuit et pas salé, la sauce grumeleuse, les pâtes froides. Il y a des jours comme ça.

    Ensuite, il était allé voir un client. Un seul. C'était bien suffisant. Il avait montré ses catalogues et ses échantillons, le type avait fait le maximum de la conversation et de plus avait passé une bonne commande. Il y des jours comme ça...

     

    Revue de presse

    L'Année du polar 1986

    Paris : Ramsay, novembre 1985. Michel LEBRUN, pages 184-185

    Route luisante de pluie, un vendredi, Jack Meridien s'arrête à un relais routier, un motel flanqué d'un bistrot et de boutiques. Une fille, aussitôt repérée, qui vit de l'autre côté de la route. Nathalie, elle s'appelle. Depuis longtemps, elle attend la venue d'un étranger qui l'arrachera à sa prison. Jack l'emmène, ignorant qu'il vient de commettre une action dangereuse.

    Dans notre série "les titres malheureux", après Le Souffle court de Fajardie, voici un Roman Toc signé Pierre Pelot, lequel n'a peur de rien, surtout pas de couillonner le lecteur qui, le pauvre, s'imagine lire un polar, tourne les pages et, après la fin, se demande par quel bout prendre ce bizarroïde récit de pluie et mélancolie, dans lequel de très vagues velléités de suspens aboutissent à pouic. Il trouve que l'auteur sait créer une atmosphère et retient quand même l'attention avec ces petits riens… Pelot, c'est un petit Mozart en pleine crise de croissance.

    Alexandrin : "Ses pieds étaient chaussés de tennis avachies…".

    Note : Un as.

     

    Page créée le mardi 11 novembre 2003.