1990
Albert Ronsin
Les Vosgiens célèbres
Vagney : Éditions Gérard Louis, 1990.
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Les auteurs
Albert Ronsin : Conservateur honoraire de la bibliothèque et du musée de Saint-Dié, docteur en histoire, auteur de plusieurs ouvrages dont Saint-Dié-des-Vosges, 13 siècles d'histoire.
Pierre Heili : Professeur d'histoire et de géographie, vice-président de la Société d'histoire de Remiremont et de sa région, responsable de la revue Le Pays de Remiremont.
Georges Poull : Ingénieur textile, historien et auteur, membre de la Société des Gens de Lettres.
Jean-François Michel : Professeur agrégé d'histoire, auteur de La Forêt de Darney.
Gérard et Marie-Thérèse Fischer : Maîtres ès lettres classiques, auteurs d'études sur le Pays de Salm.
Préface
Devant ce très beau Dictionnaire des Vosgiens,je me trouve un peu dans la situation d'un homme à qui est présenté un superbe bébé, alors qu'il a dépassé l'âge d'avoir des enfants.
Il est vrai que j'avais élaboré un plan de dictionnaires biographiques départementaux pour l'ensemble de la France. Sans doute ici et là des textes ont-ils été rédigés dans ce sens. Mais à ma connaissance, les Vosges sont le seul département ayant abouti dans cette tâche.
Constatation que je ne fais pas sans éprouver quelque contentement. Car j'ai toujours ressenti une profonde admiration et une vive tendresse pour mon grand-père maternel, Albert Dubois, natif de Saint-Dié. Il proclamait sa fierté d'être Vosgien - ni Alsacien, ni Lorrain - quelle que fût son estime pour ces deux familles de Français. Sa mère étant de Ribeauvillé,j'ai d'ailleurs encore des cousins alsaciens. Il est mort en 1944, à temps pour que l'on n'ait pas à lui cacher la nouvelle de l'incendie de Saint-Dié, qui l'aurait beaucoup affecté.
Par lui, j'ai donc des ascendances vosgiennes, et j'en ressens de l'orgueil. Car les Vosgiens, cela est bien connu, sont des hommes solides et sûrs. Mon voeu le plus cher est de n'être pas trop indigne d'eux. Mais il est aussi un autre voeu que je veux exprimer en terminant : que ce volume rencontre auprès du public un légitime succès, encourageant ainsi les auteurs rassemblés pour l'élaboration d'autres dictionnaires à terminer et à publier le fruit de leurs travaux.
Philippe WOLFF, de l'Institut
Introduction
Il y a exactement cent ans paraissait dans le tome IV de l'ouvrage collectif Le Département des Vosges, publié par Léon Louis, chef de division à la préfecture des Vosges, une Biographie générale vosgienne de 200 pages faisant suite à une Histoire générale des Vosges. Ce travail était dû à Félix Bouvier, historien vosgien estimé du XIXème siècle, qui, fonctionnaire au ministère des finances à Paris, avait pu obtenir avec assez de facilité des informations sur la carrière de ses compatriotes.
Avant la fin du XIXème siècle, Henri Jouve, éditeur parisien, lançait une série de dictionnaires départementaux illustrés, dans lesquels il présentait seulement les notabilités contemporaines, et son Dictionnaire biographique des Vosges constitue seulement un utile complément au recensement entrepris par Félix Bouvier.
L'histoire des hommes, qui fut longtemps la base de notre connaissance du passé, ayant progressivement laissé place à l'histoire des faits et des idées, le genre de la biographie était passé de mode. Pourtant la nécessité de connaître quelques traits de la vie et des activités des hommes et des femmes remarquables : parlementaires, administrateurs, ecclésiastiques, officiers, érudits, inventeurs, écrivains, artistes, est toujours aussi impérieuse car un public cultivé, de plus en plus large, ressent le besoin de trouver réponse aux interrogations nées de ses rencontres avec des statues, avec des noms découverts au détour d'une page de guide touristique ou à l'angle d'une rue, pour ne rien dire de la curiosité des amateurs de concours et de rallyes. Quant aux historiens, s'ils sont mieux armés pour trouver les documents qui situent les personnes dont ils ont besoin de suivre l'activité, ils regrettent le plus souvent de n'avoir point à portée de main un répertoire qui fournisse une notice simple et une liste de références, afin de gagner du temps dans leurs travaux.
Pourquoi un dictionnaire consacré aux Vosgiens ?
A la vérité, un dictionnaire national est plus satisfaisant pour l'esprit puisque la libre circulation des personnes permet à chacun des Français de vivre dans le lieu qui lui convient. Bien entendu, ce dictionnaire existe : il s'agit de l'exemplaire Dictionnaire de Biographie française entrepris sous la direction de Marcel Prevost et Roman d'Amat en 1928. Après soixante années de parution, il en est à la lettre H.
La longueur de l'entreprise a de quoi décourager les meilleures volontés ; elle montre qu'un ouvrage de ce type doit se limiter dans le temps (dictionnaire des contemporains), dans le genre (dictionnaire par profession), dans l'espace (dictionnaire par région ou par département), s'il veut connaître son terme dans des délais acceptables.
C'est ce qu'avait compris M. Philippe Wollf, membre de l'Institut, qui avait formé le projet séduisant de couvrir en quelques années la France d'une série de dictionnaires biographiques départementaux, dont la rédaction de chacun serait confiée à une équipe de 4 ou 5 historiens locaux ou régionaux. La défaillance de l'éditeur qu'il avait pressenti a fait sombrer ce projet.
Dans les Vosges, le travail était en cours lorsque fut connu l'abandon de cette entreprise. Allions-nous laisser là une oeuvre qui avait demandé tant d'heures de recherches et dont les auteurs ressentaient l'utilité pratique au fur et à mesure qu'ils avançaient dans leurs investigations ?
Le parti pris fut non seulement d'achever, mais d'amplifier le travail en incorporant au Dictionnaire de nouvelles personnalités qui n'y avaient pas trouvé place précédemment puisque, dans le cadre de la série prévue par M. Wolff, le nombre de notices devait avoisiner le millier.
Le contenu du Dictionnaire
Plus de mille trois cents hommes et femmes sont ici rassemblés. Certes, le nombre pourrait en être plus grand et chacun des auteurs a dû faire un choix pour ne retenir que ceux qui lui paraissaient avoir tenu une place importante dans la société de leur temps. Ce choix est donc subjectif, nous ne le dissimulons pas. Il se peut également que des personnages, d'un rang égal à d'autres qui o?=???nt été retenus, soient omis car les auteurs ne peuvent avoir, malgré leur savoir et leur bonne volonté, une connaissance égale de tout le terroir vosgien. Au moins, le travail d'une équipe composée d'hommes et de femmes de goûts et de sensibilités différents, résidant en des lieux différents, paraît plus satisfaisant pour ce type d'ouvrage que l'oeuvre d'un seul.
La liberté des auteurs a cependant été contenue dans des règles générales. Tout d'abord n'apparaissent dans le Dictionnaire que des personnes décédées, ceci afin d'éviter les blessures d'amour propre.
Les personnes élues doivent avoir un lien avec le département des Vosges : naissance, activité ou résidence. Il est vrai que Claude Gellée ou Daniel-Rops n'ont fait que naître dans les Vosges et ont ailleurs donné des preuves de leur talent, mais ils sont Vosgiens. Il est vrai que Jean-Claude Sommier, archevêque de Césarée, grand prévôt de Saint-Dié, est né en Haute-Saône, que Dom Calmet, abbé de Senones, est né dans la Meuse, que Nicolas Géliot, industriel, est né en Côte d'Or, mais c'est dans les Vosges qu'ils ont accompli l'essentiel de leur oeuvre, aussi sont-il Vosgiens.
Il nous est apparu indispensable de faire figurer dans le dictionnaire :
- les parlementaires qui sont nés ou ont représenté le
département des Vosges dans une assemblée politique nationale et les présidents
du Conseil Général des Vosges,
- les évêques de Saint-Dié et les ecclésiastiques nés dans les Vosges
qui ont été élevés à la dignité épiscopale en France et Outre-Mer (missions
étrangères) et tous ceux qui furent créateurs d'ordres ou de congrégations
en quelque lieu que ce soit,
- les officiers ayant atteint le grade de général. Pour les autres, l'appréciation
de les intégrer au dictionnaire a été laissée aux auteurs,
- tous les fonctionnaires ayant atteint le grade d'inspecteur général
- celui de conservateur pour les officiers des eaux et forêts - que nous
avons pu retrouver,
- les professeurs d'université originaires des Vosges dont nous avons
pu suivre la carrière et les travaux,
- les magistrats des cours souveraines et des cours d'appel.
A côté des écrivains, des inventeurs, des artistes, des artisans d'art, des religieux et des civils vertueux et marquants, des originaux qui constituent le fonds même et la raison d'un tel ouvrage, nous avons placé :
- toutes les familles de la noblesse vosgienne à partir
de leur origine,
- les principaux créateurs et chefs d'entreprises industrielles importantes,
- les militants politiques, syndicaux et sociaux qui ont joué un rôle
notable dans la vie socio-économique,
- les responsables régionaux de la résistance à l'occupant, de 1940 à
1944, dans les Vosges.
Nous n'ignorons pas les lacunes que comporte nécessairement une telle entreprise. Disons tout de suite notre regret de n'avoir pu, pour les militants syndicaux politiques, disposer d'une documentation qui nous eut permis de ne pas négliger la première partie du XXème siècle. De même, nous avons dû renoncer à biographier les principaux directeurs et rédacteurs en chef des journaux vosgiens, pour la plupart venus d'ailleurs, qui n'ont fait dans notre département qu'une partie de leur carrière, puis sont repartis. Ils ont souvent pesé un grand poids dans la formation de l'opinion publique, notamment de 1880 à 1940 ; leurs noms étaient connus de tous, mais pour un Pierre Christophe retrouvé répertorié, combien d'Aylies ignorés ? Même Louis Bagerel, plus connu sous son pseudonyme si évocateur de Pol Ramber, auteur de plusieurs livres, créateur de La Pie Vosgienne, n'a pu être appréhendé correctement !
Enfin, il est apparu utile de compléter le dictionnaire par quelques annexes :
- état de classement par communes des personnages biographiés,
- liste des préfets des Vosges,
- liste des présidents du Conseil Général des Vosges,
- liste des évêques de Saint-Dié.
Les illustrations qui agrémentent l'ouvrage ont un double but. Celui tout d'abord d'aider à la connaissance des biographiés en révélant leurs traits : de nos jours, une telle préoccupation va de soi, mais sait-on?=??? que dès le XVIIème siècle et surtout au XVIIIème siècle, nombreux étaient les savants de cabinet qui, s'étant fait peindre pour conserver leur image à leur descendance, avaient le souci de faire reproduire par la gravure sur cuivre ou en taille douce ce portrait afin de l'envoyer à leurs correspondants habituels dispersés dans l'Europe entière, afin que ces derniers puissent mettre un visage sur le nom et le titre de celui avec qui ils échangeaient des informations ?
L'autre but est de rendre le livre agréable à consulter, de lui faire perdre un peu de son austérité présumée ; une telle énumération de dates, de noms, de faits, n'autorise pas l'usage de fleurs de rhétorique ; il faut bien compenser ce style un peu rude - ou l'absence de style - par quelques illustrations !
Nous ne voudrions pas terminer cet exposé liminaire sans remercier les membres des familles, les érudits, les fonctionnaires, les bibliothécaires, les archivistes, les agents de l'état civil et les innombrables personnes qui,ont accepté avec bienveillance de répondre à nos questionnaires.
Cette oeuvre est aussi la leur, car sans les informations qu'ils ont mises à notre disposition, ce livre n'aurait pu, malgré ses imperfections, être mené à son terme.
Enfin, je me dois, à titre personnel, d'exprimer ma gratitude à Madame FISCHER, à Messieurs FISCHER, HEILI, POULL et MICHEL qui ont, tout au long des trois années de la rédaction de l'ouvrage, accepté de suivre les consignes générales et de respecter les délais prescrits. Je n'aurais garde de ne pas exprimer aussi mes vifs remerciements à Monsieur Gérard LOUIS, l'éditeur attentionné du Dictionnaire, qui a mis tous ses soins à produire un livre qui soit digne des Vosgiens dont nous avons restitué la vie et l'oeuvre, et qui fasse honneur à son industrie et à notre département.
Albert RONSIN.