Les Passagers du mirage

 
 
 

Date et lieu

Dans un futur proche, au Canada.

Sujet

Maureen O'Haoyes se rendit directement aux toilettes dames. A l'intérieur des toilettes, il y avait quatre compartiments fermés. Elle entra dans le premier. Une heure plus tard, Maureen O'Haoyes se présentait à l'embarquement pour le vol 534 qui devait l'emmener, via Montréal, de l'autre côté de l'océan, à Londres 4, où il était prévu qu'elle assiste à de nombreuses conférences.

Comme prévu, donc, elle y assisterait. Pourtant, un quart d'heure après son entrée dans les toilettes dames, soit environ dix minutes après le départ de la voiture qui emmenait Maureen O'Haoyes vers l'aéroport, Maureen O'Haoyes sortit du restoroute et traversa d'un pas rapide le parking, jusqu'au taxi dans lequel elle monta… (4ème de couverture, 1986).

 

Éditions

Couverture anonyme.

  • 1ère édition, 1986
  • Paris : Fleuve Noir, janvier 1986 [impr. : 11/1985].
  • 18 cm, 185 p.
  • Illustration : couverture anonyme.
  • (Anticipation ; 1426).
  • ISBN : 2-265-03169-0.
  • Contient une "Fiche géocivique de l'auteur" et un "Commentaire autoportrait" (pp. 7-8).
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  • 2ème édition, 2014
  • Paris : éditions Bragelonne, 18 août 2014.
  • (Bragelonne Classic).
  • Livre numérique.
  • 113 p.
  • ISBN : 978-2-8205-1701-2.
  • Prix : 2,99 €.
  • Maureen O'Haoyes va aux toilettes, puis prend un taxi qui l'emmène à l'aéroport où l'attend un avion pour Londres. Elle doit assister à des conférences. Dix minutes après le départ de la voiture, une femme sort des toilettes, puis prend un taxi. Il s'agit de Maureen O'Haoyes...
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    Première page

    Dans la nuit du 2 au 3 juillet de cette année-là, un peu après vingt-deux heures, une voiture franchit les trois barrages protecteurs successifs, puis le portail d'entrée de l'enceinte murée de cette grande et très ancienne propriété qui abritait les effectifs du C.R.E.E.S. Le chauffeur portait l'uniforme kaki de l'Armée (c'est-à-dire de la Milice Corporatiste du C.R.E.E.S. d'Energies World), et une casquette dont la visière lustrée mangeait totalement son front bas. A chaque barrage, il ralentit et s'arrêta, présenta son laissez-passer. Sur les portières de la voiture était peint le sigle du C.R.E.E.S. - le même que celui, discret, qui surmontait un des piliers de l'entrée de l'enceinte.

    La voiture n'eut pas à pénétrer bien loin à l'intérieur de la propriété ; elle roula sur une dizaine de mètres, pas davantage, puis effectua un parfait demi-tour sur l'allée, faisant à peine crisser le gravillon sous ses pneus. Elle s'immobilisa de nouveau à hauteur des petits bâtiments éclairés qui encadraient l'entrée. Les mêmes gardes armés qui avaient vérifié ses papiers deux minutes auparavant se tenaient toujours à leur poste, debout, le visage fermé : ils avaient suivi la manœuvre de la voiture sans broncher, d'un regard terne, les mâchoires crispées.

    La porte de verre dépoli d'un des petits bâtiments s'ouvrit sur une longue silhouette féminine, la main gauche dans la poche de son manteau ample et léger, la droite refermée sur la poignée de sécurité d'une mallette noire. On pouvait dire de cette femme qu'elle était svelte et élancée… mais aussi qu'elle était tout simplement maigre. Son visage osseux exprimait une dureté non dénuée d'un certain charme ; dans le jeu des ombres dures et lumières tranchantes qui baignaient l'endroit, il était difficile, impossible, d'attraper son regard, d'en lire l'expressivité, la couleur : c'était juste une barre d'ombre. Le bas de son manteau fouettait ses jambes nues à mi-mollet ; lorsqu'elle prit place dans la voiture, sur le siège arrière, le mouvement découvrit ses jambes au-dessus du genou : elles étaient fines, élancées… ou maigres… mais pas vilaines, cependant. Elle avait des cheveux noirs, épais et luisants coiffés très ordinairement, tirés en arrière sur sa nuque et rassemblés en sorte de chignon démodé - mais ce style de coiffure lui allait bien.

    La femme n'échangea pas la moindre parole avec le chauffeur, rien. Lequel, d'ailleurs, n'ouvrit pas davantage la bouche. Pas même pour un salut.

    La voiture démarra souplement et franchit le portail à commande électronique, qui coulissa et se referma sitôt passé le véhicule.

    La voiture dut s'arrêter de nouveau aux trois barrages successifs, et le chauffeur présenter ses papiers et laissez-passer. La femme aussi. Le contrôle s'effectua toujours sans échange de paroles, de part et d'autre ; de toute évidence, contrôlés et contrôleurs savaient devoir se soumettre à cette routinière formalité - ils s'y attendaient.

    La femme avait trente-deux ans. Les papiers et la carte génocivique qu'elle présenta à la vérification l'attestaient indubitablement, bien qu'elle parût peut-être plus âgée.

    Elle s'appelait Maureen O'Haoyes.

     

    Page créée le mardi 4 novembre 2003.