La petite histoire... Ce roman n'est paru qu'en feuilleton dans la presse.
Elisabeth Bricoux sort du supermarché, très énervée. Elle a fait un grand détour espérant que les prix seraient plus avantageux et, en définitive, elle n'a réalisé aucune économie. Elle regagne son quartier en fulminant contre le responsable de tous ses ennuis : son mari !
C'est un ingénieur de haut niveau dans le domaine des produits de beauté haut de gamme. Il avait été envoyé au Brésil dix ans plus tôt pour superviser la construction d'une nouvelle usine et en prendre la direction. Bien entendu, Elisabeth l'avait suivi avec leur fille. Tous les trois avaient mené une vie luxueuse à Rio, mais il avait été muté en Amazonie pour une nouvelle extension et avait décidé de faire rentrer les siens en France prétextant que c'était indispensable pour leur santé à cause de la chaleur humide de l'endroit où il allait. Il avait jugé également que c'était préférable pour l'instruction de leur fille Virginie. Comme il avait un caractère très autoritaire et avait insisté pour qu'elles retournent rapidement en France, Elisabeth avait fini par accepter.
Maintenant elle le regrette amèrement.
- Il m'a roulé ! Il m'a roulé ! marmonne-t-elle.
C'est vrai car il était resté à Rio ayant obtenu des responsabilités encore plus importantes au niveau international. Le déplacement pour une région au climat difficile à supporter avait été une pure invention. De plus il avait installé chez lui une jeune brésilienne. Mais cela, elle ne l'avait appris qu'un peu plus tard. Soi-disant cette personne s'occupait de la maison, mais elle avait immédiatement engagé quelqu'un pour la seconder !
Bricoux a quand même procuré à sa femme un appartement situé rue du Rang Sénéchal à Remiremont, et comme il a tout prévu pour le meubler et y faire mettre les objets de première nécessité, elle a pu l'occuper peu de jours après son retour en France. C'est dans un petit immeuble tranquille puisque les autres logements, en transformation, ne sont pas encore loués. Mais il a deux inconvénients majeurs, d'abord il n'y a même pas de balcon or s'occuper d'arbres et de plantes a toujours été son passe-temps favori. A Rio elle y consacrait plusieurs heures par jour. Elle a même rapporté en fraude un fongicide miracle qu'on ne trouve qu'au Brésil et elle espère qu'il conservera ses vertus jusqu'au jour où la chance lui redonnera un grand terrain. A ses yeux son nouvel appartement a un deuxième défaut : il est situé près de la maison où elle a vécu depuis son mariage jusqu'à son départ pour l'Amérique du Sud, et qui comporte terrasse et jardin ! Elisabeth Bricoux est donc forcée de passer souvent devant.
Instinctivement, quand elle est dans ce coin, elle se redresse, prend un air désinvolte ; elle ne veut surtout pas donner l'impression d'avoir été maltraitée par l'existence. Elle jette un coup d'œil à son sac de voyage Vuitton qui n'est pas défraîchi. Il ne faut pas que l'on puisse la plaindre. Les gens n'ont pas à savoir qu'il lui sert uniquement à rapporter les provisions.
Un matin, en faisant ses courses, elle voit arriver Thérèse Montier qui autrefois travaillait chez elle et dont elle a gardé un bon souvenir. En se reconnaissant, l'une et l'autre ont les mêmes pensées.
- Elle a pris un coup de vieux.
- Elle fait négligée.
- Elle est sûrement toujours aussi bavarde.
Page créée le dimanche 8 août 2010. |