Les Charmes de l'horreur

 
  • Éric Verteuil
  • 1989 | 27ème roman publié
  • Horreur |
 

Date et lieu

A la fin des années 1980, en France, quelque part au bord de la mer...

Sujet

Sous la menace de son revolver, Hermann fit entrer le teinturier dans sa machine. Il mit le contact et le tambour tourna. Pour le prisonnier, le monde bascula.

Ce n'était rien. Plus tard, il allait être coupé en tranches et passé au mixeur. (4ème de couverture, 1989).

 

Éditions

Couverture de Dugévoy.

  • 1ère édition, 1989
  • Paris : Fleuve Noir, septembre 1989 [impr. : 08/1989].
  • 18 cm, 152 p.
  • Illustration : Dugévoy (couverture).
  • (Gore ; 98). Collection dirigée par Juliette Raabe et Alain Garsault.
  • ISBN : 2-265-04183-1.
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    Première page

    Anne ouvrit les volets et se retourna vers les meubles couverts de poussière, les toiles d'araignées qui tombaient du lustre, le carrelage écaillé.

    - On n'a pas fini de nettoyer… Tu parles de vacances !

    - Allez ! ma petite Anne, ne râle pas ! Bientôt ce sera impeccable… enfin presque. Entre nous, je ne pensais pas qu'en un an ça deviendrait aussi sale.

    Découragées, elles montèrent au premier étage. Les chambres à coucher étaient dans le même état, mais la vue était toujours aussi magnifique : la lande avec ses ajoncs, les rochers aux formes étranges et, dans le lointain, la mer.

    Au premier abord, les deux sœurs Kerlande ne se ressemblaient pas. Florence, blonde, bouclée, maquillée avec soin, arborait des robes provenant d'une bonne boutique de dégriffés. Anne, l'aînée, les cheveux bruns tombant sur les épaules, ne portait que des jeans délavés et sur son chemisier un vieux pull qu'elle n'enfilait jamais, se contentant de nouer les manches autour du cou. Mais si on les observait, on constatait qu'elles avaient les mêmes yeux gris pailletés, la même bouche bien dessinée découvrant des dents blanches et petites.

    Avant d'arriver, elles s'étaient arrêtées au supermarché pour acheter, en plus du ravitaillement, des produits d'entretien, des torchons et des brosses dures. Elles pouvaient donc se mettre au travail sur-le-champ.

    Elles enlevèrent la saleté accumulée partout mais, malgré leurs efforts, ne réussirent pas à faire briller le sol.

    - C'est inefficace et épuisant, dit la plus âgée.

    - Si tu veux, arrêtons-nous !

    - Oui, il vaut mieux en faire un peu tous les jours.

    Flo sourit, comprenant que, comme les années précédentes, c'est elle qui briquerait l'évier, les lavabos et les boiseries ! Comme ce n'était pas une corvée pour elle, elle n'éleva aucune objection.

    Grâce à cette décision, elles eurent le temps, avant de dîner, d'aller jusqu'à la falaise, de descendre le chemin à pic qui menait à la plage et de se baigner.

    Après avoir profité des derniers rayons du soleil, elles revinrent à la maison en plaisantant, préparèrent un repas qui n'avait rien de gastronomique car, ni l'une ni l'autre n'aimait faire la cuisine.

    Quand Anne eut terminé l'omelette et la salade, elle prit un air très sérieux.

    - Au printemps je ferai réaménager la cuisine et construire deux salles de bains ; l'une rose pour toi, l'autre bleue pour moi.

    Florence reposa sa fourchette et regarda sa sœur avec des yeux ronds.

    - Tu joues au loto ?

    - Non !

    - Où prendras-tu l'argent ?… Même si tu trouves un job à la rentrée, ce n'est pas avec un salaire de secrétaire que tu paieras tout cela.

    - Mais mon livre !

    Florence eut l'air navré ; les illusions dont sa sœur se berçait lui causeraient des désenchantements et il était préférable qu'elle revienne à la réalité le plus vite possible.

    - Ma chérie, dit Florence, tu as déjà une veine formidable que ton bouquin ait été accepté. En général le premier est toujours refusé. D'accord il va paraître, mais il faut être lucide, ce n'est pas un tirage de trois mille exemplaires qui fera de toi une millionnaire.

    - Je suis persuadée que ça va marcher et qu'il aura des réimpressions. L' histoire est très originale et…

    Florence leva les yeux au ciel ; elle allait entendre pour la énième fois les aventures de cette romancière qui, afin de stigmatiser les vices de ses contemporains, les faisait tourmenter par un justicier appelé Hermann.

    - Ce personnage m'a donné beaucoup de mal mais il est très réussi.

    - Et ses supplices font froid dans le dos !

    Le principal c'est la philosophie qui s'en dégage ; il faut que le monde s'améliore même si c'est au prix de châtiments.

     

    Épigraphe

    Les charmes de l'horreur n'enivrent que les forts (Charles Baudelaire).

     

    Revue de presse

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    Page créée le mardi 9 décembre 2003.