Une mère admirable voudrait que sa fille fasse un riche mariage, alors elle jette son dévolu sur un propriétaire terrien de la région. Il a un gros avantage : sa fortune est considérable. Et un énorme inconvénient : il est déjà marié. Qu'à cela ne tienne ! Un meurtre éclaircira la situation.
Mais, dans cette ville de province, les ragots vont vite, les scandales sont nombreux ; la domestique trop bavarde, le gigolo trop beau, la belle-sœur trop nymphomane ainsi que quelques autres vont changer le cours des événements (4ème de couverture, 1976).
La petite histoire... Natif d'Angers, Alain Bernier connaît bien cette ville... Ce roman fait entrer en scène le commissaire Jean-Pierre Varlet que l'on retrouvera dans une petite dizaine d'autres histoires par la suite (il sera muté sur Paris).
La rue des Arènes est vide.
Evelyne Grioux a envie de se laisser aller ; pour elle, ce serait moins éprouvant de marcher, le dos voûté, en traînant les pieds, que de se redresser et prendre un air désinvolte, mais elle sait que derrière les voilages des fenêtres, des yeux malveillants sont à l'affût et elle ne veut pas donner l'impression d'avoir été maltraitée par l'existence. Elle hâte le pas et prend un sourire figé ; elle jette un coup d'œil à son sac de voyage qui n'est pas défraîchi et nul ne pourrait penser qu'il lui sert à rapporter ses provisions.
Elle fait ses courses rue Lenepveu qui lui semble plus populaire et où elle est sûre de ne rencontrer personne de connaissance ; sous aucun prétexte elle ne voudrait que ses anciennes relations puissent savoir qu'elle n'a même pas une femme de ménage.
Dix ans déjà !
Il y a dix ans, elle avait quitté Angers en espérant bien ne plus jamais y revenir… Et de nouveau, elle était forcée d'y habiter.
La soirée d'adieux qu'elle avait donnée avait été un triomphe : plus de cent invités se pressaient dans les salons et dans le jardin de son hôtel particulier de l'avenue Jeanne d'Arc. Pour cette occasion, elle avait commandé une robe chez Dior et avait fait en sorte que cela se sache. Pourquoi dépenser de l'argent si les autres l'ignorent ! Son mari lui avait offert une étole en vison et, malgré la chaleur accablante, elle l'avait arborée, prétextant un courant d'air, au moment de souper. Maintenant, il ne reste qu'une mince bande de fourrure qui a échappé à l'usure et qu'elle a cousue sur le col de son manteau de drap.
Au moment où elle descend du trottoir, face à l'église Saint-Joseph, elle voit arriver Constance Reboul, son ancienne cuisinière. Son premier réflexe et de tourner rue Desjardins pour n'avoir pas à lui parler, mais elle se rend compte qu'elle est trop près pour l'éviter. Et puis Constance consentira peut-être à venir faire quelques heures de ménage, ce qui lui permettra de parler à ses amies de sa fidèle servante !
- Ma bonne Constance, c'est vous, dit-elle d'un ton mielleux.
Un instant, elle craint que cette expression ne soit un peu démodée, mais elle se rassure en pensant que les mœurs évoluent lentement en province.
- Madame Grioux ! Quelle surprise ! Cela me fait plaisir de retrouver Madame après si longtemps.
- Dix ans que nous ne nous sommes pas vues.
- Bientôt onze… Eh ! Oui, il y onze ans que je ne suis plus au service de Madame.
Quel réconfort de l'entendre s'exprimer à la troisième personne.
Constance examine son interlocutrice de la tête aux pieds : ses chaussures sont éculées, ses bras sont épais et son manteau râpé. Ces signes indéniables de revers de fortune incitent la vielle domestique à demander :
- Et Monsieur, comment va-t-il ?
- Il… il est encore au Togo.
- Pour ses affaires, bien sûr ?
- Oui
- Il doit être bien triste, tout seul.
Constance se demande si elle ne va pas un peu loin, car il était de notoriété publique que, jadis, il n'était heureux que lors des absences de sa femme.
- Ah ! non, alors ! glapit Evelyne qui, brusquement, a envie de raconter ses malheurs.
- Que vous est-il arrivé ?
- Il s'est entiché de….
- D'une femme ?
- Non !
Constance est ébahie ; M. Grioux, qui regardait les petites filles d'un oeil vicieux, aurait-il évolué à ce point ?
Mystère Magazine
Juillet 1976
L'Opinion de Michel Lebrun
Une bonne mère rêvant (elles le font toutes) d'un riche mariage pour sa fille, se trouve en butte à une série de déconvenues et décide, pour arriver plus aisément à ses fins, d'utiliser une brioche au cyanure de façon à liquider la jeune épouse d'un monsieur qui, une fois veuf, ne manquera pas d'épouser fifille. Seulement les choses n'évoluent pas exactement de la manière espérée. La Raide morte, on le voit, est une comédie de meurtres qu'il ne faut pas (comme son auteur) prendre au sérieux, encore que, dans les bonnes provinces françaises… mais passons. C'est rondement mené, agréablement écrit, et cela vous procurera, je vous en donne ma parole deux heures de saine détente.
L'Opinion de Georges Rieben
Les deux auteurs se cachant sous le nom d'Éric Verteuil m'ont avoué s'être bien amusés à écrire La Raide morte. Je le crois sans peine. Le sujet évoque un peu de Ferrière, mais il s'agit là plus d'une jolie pochade que d'un roman. Au tour du lecteur de s'amuser.
Bulletin de l'Académie Gauloise
Eté 1976
Un roman qui ne doit rien à Montherlant mais qui mérite d'être lu et dont le dénouement vous surprendra.
Page créée le dimanche 7 décembre 2003. |